Eugenio Montale « Sous la pluie »

Mardi 22 mars 2016, par Jean Gelbseiden

Quand pluie et mélancolie riment et s’accordent pour l’écriture d’un poème de la nostalgie… Là encore, le poète prouve sa grande maîtrise de la langue, en même temps que la subtilité de ses sentiments.


SOUS LA PLUIE

Un murmure ; et ta maison s’embue
comme dans la brume du souvenir —
le palmier est en larmes : sourde
pèse la dissolution qui retient
dans la touffeur des serres même les espérances
nues et le remords d’une pensée.

« Por amor de la fiebre »… un tourbillon
m’entraîne avec toi. Rouge vif, un store
rayonne, une fenêtre se referme.
Gravissant l’allée maternelle chemine,
coquille d’œuf qui va parmi la boue,
un peu de vie que fouettent ombre et lumière.

Adios muchachos, compañeros
de mi vida, grinçait ton disque dans la cour :
et je chéris mon masque si me reste
encore, passé les moulinets du sort,
le soubresaut qui ramène
sur ton sentier.

Je suis les ruissellements qui brillent et, nuées au fond,
la fumée traînante d’un navire.
Une trouée se trace point à point…
Par toi
Je comprends ce qu’ose la cigogne quand
son vol s’élance de la flèche brumeuse
et rame vers la ville du Cap.

Eugenio Montale

 

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