Attila József « Le compte est prêt »

Mercredi 16 mars 2016, par Jean Gelbseiden

« Le compte est prêt » affirme le poète dans le dernier texte présenté dans le recueil « Le Miroir de l’autre » et publié par les Éditions de la Différence, dans la collection « Orphée ».
Eh oui ! Le compte est prêt, pour solde définitif de la vie, passeport dernier vers l’inconnu, dernier train de souffrances dans cette approche asymptotique de l’autre, tout comme l’est l’approche de soi-même.
Jozsef Attila en profite, non pour régler ses comptes avec l’Humanité, mais pour faire le bilan de sa propre vie, avec la distance et l’humour indispensables à une peinture qui se veut objective.


LE COMPTE EST PRÊT

Entre mes mains j’ai remis mon esprit :
Quand on a rien, ce n’est pas un gros prix –
Le même mal et la même dépense
Que l’animal pour mourir en silence.
Je suis né, j’ai rejoint, j’ai pris congé,
J’ai tenu bon même dans le danger.
Que s’amusât de moi quelque donzelle,
Je la croyais : c’était tant pis pour elle !
Jamais avare, et bon payeur toujours –
Quant aux faveurs, je réglais en amour.
J’ai fait le fou parmi les messieurs sages,
Rincé le pont, halé sur les cordages,
Vendu de tout, crécelles, pain, bouquins,
Journaux ou vers : ce qui s’achetait bien –
Et pour finir, je crois, ni tendre corde
Ni grand trépas, mais le drap qui me borde.
Le compte est prêt, à raison ou à tort.
J’ai vécu – d’autres déjà y ont trouvé la mort.

Attila József

Pour lire sur notre site d’autres textes de cet auteur :

 

Donnez-nous votre sentiment sur ce texte, en cliquant sur ce lien :

Réagir à ce texte

ainsi vous rendrez le site plus interactif par vos contributions, merci d’avance.