Tudor Arghezi, 6e épisode le 25 septembre

Vendredi 25 septembre 2015, par Jean Gelbseiden

S’il fallait donner une preuve encore du scepticisme du poète, « Ex Libris » en serait le lieu. Pour citer Tudor Arghezi : « Voici qu’en vérité tes feuillets, un à un, / Avec la lettre sainte furent imprimés ». Mais le ravissement est de courte durée ! le « Livre » fameux le laisse sur sa faim, et je laisse bien évidemment au poète la responsabilité de son affirmation. Peut-être la divinité de cet ouvrage tient-elle justement dans la proposition qu’il fait à l’Homme de rejoindre le divin par un comportement respectueux de l’autre et de son environnement… Mais ce paradis ne semble, hélas, pas pour demain !

EX LIBRIS

Livre plein de beautés, gloire à qui t’écrivit,
Oeuvre de mille soins et d’infinie patience ;
Pareil à une fleur épanouie en confiance
Tu me semblas entre mes mains, quand je t’ouvris.

Tu ressembles au violon qui sait exprimer
L’amour le plus vibrant sur le plus fin des écrins ;
Voici qu’en vérité tes feuillets, un à un,
Avec la lettre sainte furent imprimés.

Un homme fait de sang prend aux cimes la boue,
Afin d’en modeler son grand fantôme
Avec un songe, une ombre et quelque vague arôme,
Et le ramène vivant parmi nous.

Mais combien vaine paraît l’oblation,
Ce malgré les beaux vers que le livre contient.
Car, mon livre adoré, toi qui ne sers à rien,
Tu ne saurais répondre à la moindre question.

— Tudor Arghezi

 

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