Aleksander Wat, poète du 21 mars

Samedi 21 mars 2015, par Jean Gelbseiden

Tout est dans tout, et inversement… Le poème « Archerie japonaise » pourrait y faire penser. Dédié à la belle-fille japonaise d’un couple ami, la jeune Ayako Morris, ce poème philosophique fut écrit alors qu’Aleksander Wat séjournait chez les Morris, à Nesles-la-Gilberde, au sud-est de Paris…


ARCHERIE JAPONAISE

I

La main dit à la corde :
Sois docile.
La corde répond à la main :
Bande-moi hardiment.
La corde dit à la flèche :
Vole comme l’éclair.
La flèche répond à la corde :
Attise mon élan.
La flèche dit au but :
Brille.
Le but répond à la flèche :
Aime-moi.


2

Le but dit à la flèche corde main oeil :
Ta twam asi
Ce qui en langue sainte signifie :
Je suis toi.


3

(Commentaire d’un chrétien :
Mère de Dieu
Protège le but, l’arc, la flèche,
et l’archer.)

Aleksander Wat, Nesles-la-Gilberde, août 1956

 

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1 Message

  • Aleksander Wat, poète du 21 mars 25 mars 2015 09:06, par Nicolas Courbey

    « Mère de Dieu,
    Protège le but, l’arc, la flèche
    Et l’archer »…

    Aleksander Wat apparaît plus chrétien que juif ici, et montre que même dans l’ « archerie japonaise », le besoin d’être béni (« protégé ») par cette instance à la fois supérieure et aimante qu’est « la mère de Dieu » est nécessaire, pour que rien ne soit laissé « au hasard », ni n’aille vers un danger trop grand.
    Oui, pour le poète, même si pour les japonais le tir à l’arc est une voie spirituelle, il faut véritablement autre chose — une divinité qui assure, qui rassure, qui perfectionne et qui aime, comme une mère, la mère de Dieu — « Commentaire d’un chrétien »…
    Car « le but, l’arc, la flèche et l’archer » ne sont après tout que fragiles choses, comme tout ce qui a été créé.
    Sans doute est-ce pour cela que ce poème est si sage.

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