Édouard Glissant, le poète du 31 mars

Samedi 31 mars 2012, par Mots Passants

ACCLAMATION

I

Prenez-moi au brasier de boues de tôles de manguiers
Que tarisse le mot limpide et finisse l’aridité
où fut la paille et toute chose non cernée
Il est temps d’arrêter l’errance immense et il est temps
d’armer le chant aux continents
qui passent nous hélant au large de midi
Ô souci, sel d’écumes sur la mort posées, mon noir pays.
Prenez-moi dans l’été qui n’a pas de printemps, ô cri.

II

C’est la ville, muette dans son argile. C’est le bois vert, où s’accore* la nuit.
Ce sont nos chiens, qu’on voit laper entre deux vents.
Chiens gris, maigres sorciers de notre absence, chiens errants. C’est des femmes, farouches faims, et des hommes, bouches sans dents. Roux des usines, cuvées de l’an. Je n’ai nommé la mer, qu’épouse.
Un cri noir, désuni de la noire procession. Ô ce pays ferme la mer et sur le bruit des peuples qui approchent
Rabat ses portants de sable, avec leurs verrous de roches.

III

J’ai fait demeure d’un tel cri, où il n’est terre qui se lève ; et n’est aucune grève
auprès des mers où j’ai été.

Celui que le cyclone a déjeté, il voit la boue devant la porte, le sentier qui conduit aux nuits où chacun sur la mort vacille.

Et il entend la terre où plus d’un nom fut enfoui.

IV

Entends les pays, derrière l’îlet.
Edouard Glissant

 

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