« Attiré d’abord, dans le sillage de Salvador Dali, vers la peinture, grâce à laquelle il peindra »Paloma de la Paz« , Rafael Alberti est dans sa jeunesse atteint d’une » adénopathie hilaire « maladie pulmonaire. » Sequestré « dans sa chambre pendant quelques mois, il s’adonne à la lecture de Juan Jamon Jiménez et d’Antonio Machado, ainsi que Gogol, Dostoïevski, Tchekov et d’autres…—à ce qu’en écrit Claude Couffon dans la présentation biographique qu’il fait en introduction à la traduction de son ouvrage » Marin à terre "— Et il se met à écrire des poèmes dont un composé pour une fiancée imaginaire qu’il nommera du mot décrivant son propre état à ce moment-là. Au-delà de cette activité picturale d’abord, poétique ensuite, Rafael Alberti prendra part au mouvement révolutionnaire espagnol auquel Paco Ibanez apportera son soutien en créant la musique d’un des poèmes d’Alberti. De l’Espagne à l’Italie, Alberti entreprend le premier voyage d’un long et douloureux exil, qui le conduira entre autres en Amérique du Sud, avant qu’il ne revienne dans sa région natale, après 1975, date de la mort de Franco.
A FEDERICO GARCIA LORCA
POÈTE DE GRENADE (1924)
II PRINTEMPS
Toutes mes fiancées, de mer et de terre
—Amarante, Corail et Serpentine,
Trèfle-de-l’Onde, Rose, Léontine—,
vertes du soleil, du vent, des sierras ;
ouvertes par la brise et rassemblées,
te couronnent là, au milieu des dunes,
d’amarantes, de coraux et de lunes
de trèfles de l’onde à l’aube éveillée.
Venez, vents de la mer, et regardez
l’ami, couronné par mes fiancées,
si doux, incliné sur les hautes dunes !
Venez, poissons des mers, chantons ensemble :
—Poisson bleu je te nomme, à tous les vents,
poisson des bois et monts, rouge poisson !
III ÉTÉ
Viens, en t’abreuvant de champs et de villes,
et cerf devenu, d’eau long cervidé,
rejoins cette mer aux blanches clartés,
ce doux nid bercé du martin-pêcheur ;
car je vais aller t’attendre, soumis,
et jonc devenu, dans les hauts espaces,
blessé par l’air vif tandis que me hèle
ta voix solitaire au sein des tempêtes.
Jonc fragile et froid, laisse-moi écrire
mon nom sur ces eaux livrées à leur cours
que le vent appelle, esseulé, rivière.
Emportant mon nom fondu à ta neige,
retourne à tes monts grimpant vers leurs cime,
cerf d’écume, roi de la vénerie.
Rafael Alberti
Rafael Alberti, le poète du 25 mars
Vendredi 26 avril 2013, par
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